lundi 28 mai 2007

Note concernant la première scène

Plutôt que de corriger la scène que j'ai déjà écrite, je produis une série de notes que j'incorporerai lors de la révision final de l'histoire. Ainsi j'essaie de garder la progression de l'histoire dans le bon sens.

Remplacer les références à l'anesthésique par un produit hypnotique. C'est un produit qui induit le sommeil sans pour autant limiter l'activité musculaire comme pendant une anesthésie.

Il y en a dans le cargo pour calmer et stabiliser un membre d'équipage en cas de problème médicale du genre fracture, commotion ou lors de problèmes psychiatriques.

Deuxième scène

Où?

Dans le cargo Mercure de retour de la ceinture de Kuiper. Plus précisément dans la partie habitable du cargo constituée des trois sections cylindriques en enfilade qui hébergent le poste de pilotage, la section de vie commune et la zone où sont installées les deux stations de suspension.

Un autre lieu apparaît dans la scène, bien que ce ne soit qu'à travers la radio: le bureau du Prévôt sur Terre. C'est un grand bureau (il y a de l'écho) qui se trouve au sommet du bâtiment administratif des forces de sécurité (toutes les personnes impliquées dans les vols spatiaux connaissent l'architecture du centre administratif de sécurité), que le Prévôt occupe seul (car personne d'autre n'intervient dans la conversation).

Quand?

Le cargo est en phase finale d'approche de la Terre. La décélération est terminée. La Terre se trouve encore à 3.5 jours, on est donc 1/2 journée après la première scène.

Qui?

3 personnages sont mis en avant: H2 et Scott5 dans le cargo, le Prévôt dans son bureau sur Terre.

Agenda de chaque personnage:

Scott5: il est encore inconscient. H2 s'est sans doute trompé dans la dose d'hypnotique qu'il a injecté. Il ne voulait que l'endormir pour une heure ou deux, mais il est plus prêt de cinq. Scott5 est toutefois en bonne santé.

H2: son principal conflit avec la société n'est bien sûr pas résolu. Il ne veut plus être considéré comme un humain de deuxième catégorie mais veut obtenir le même statut que les originaux. C'est dans ce cadre qu'il va entrer en conflit direct avec le Prévôt lorsqu'il va se rendre compte que ce dernier est clonophobe. Le conflit entre H2 et Scott5 n'évoluera pas dans cette scène.

L'objectif de H2 est de convaincre les autorités de la Terre qu'il est sérieux et qu'il est capable de mettre ses menaces à exécution.

Le Prévôt: il doit résoudre la crise qui menace la Terre. Il pense que ce sera facile puisqu'il ne s'agit que d'un clone. Il cherche donc à évaluer le risque, jusqu'à quel point la menace est sérieuse. Lorsqu'elle lui apparaît comme telle, il essaie de gérer la situation et de montrer à H2 que son plan ne pourra pas fonctionner. Il cherche à le raisonner dans un premier temps, mais change rapidement de stratégie lorsqu'il réalise la détermination de H2. Il se met en colère. Résoudre ce cas va prendre plus de temps que prévu et il est déjà au milieu d'une autre affaire: une explosion louche des générateurs de la clinique où sont cultivés les clones (une action qu'il soutiendrait mais sur laquelle il doit enquêter). Il finit par montrer sa haine des clones en générale et menace à son tour de détruire le cargo dans l'espace.

Caractérisation:

H2 boit continuellement du reconstituant liquide. Par conséquent il va pisser. De plus, pendant la tranche de mission dans la ceinture de Kuiper, il a changé son apparence: il s'est laissé pousser la barbe et les cheveux. Il ne le sait pas encore, mais c'est pour ne plus ressembler à son original.

Le Prévôt est un militaire. Il fait des phrases courtes avec un vocabulaire martial. Il grogne lorsqu'il n'est pas content, il fait pas mal de sons gutturaux. De plus, il joue en permanence avec une badine qu'il frappe dans sa main, sur son bureau ou contre la jambe de son pantalon (H2 doit décoder le bruit à la radio).

Action:

H2 est en train de pisser quand la scène commence, conséquence de son addiction au reconstituant. Il en profite pour revenir sur les dernières heures: le responsable du port a essayé de la recontacté, il l'a ignoré. Il se rappelle de sa courte vie tout en sortant des chiottes, allant cherché un nouveau container de reconstituant qu'il entame immédiatement, passant devant Scott5 qui dort toujours et se remettant à l'inventaire des vivres comme si la mission se terminait normalement.

Un nouvel appelle à la radio arrive. H2 s'apprête à l'envoyer bouler quand le Prévôt se présente. H2 s'interrompt un court instant, mais essaie de continuer sa tâche tout en parlant avec le Prévôt.

Le Prévôt pose des questions pour évaluer le risque. Il demande à H2 de répéter ses revendications, essaie de le convaincre que son comportement ne tend pas à le crédibiliser auprès des autorités politiques, lui montre qu'il est plus vu comme une menace à éliminer qu'un citoyen responsable. H2 reste intraitable.

Le Prévôt essaie ensuite de lui faire se rendre compte qu'il va tuer un grand nombre de personnes. Est-il prêt à faire ça? Est-il prêt à être reconnu comme un meurtrier en masse. H2 répond qu'il s'en fiche puisqu'il sera très probablement mort, mais qu'il espère que son geste forcera la société toute entière à réfléchir au problème qu'il a soulevé.

C'est à ce moment que le Prévôt se met en colère. Devant la détermination de H2, il ne lui reste plus que la violence. Verbale d'abord. Il signal l'autre affaire. Il s'emporte, place tous les clones dans le même sac, dit qu'on aurait jamais dû se lancer dans le clonage pour commencer, que les clones n'ont pas plus de valeur que des parasites et qu'on serait mieux sans ce problème supplémentaire à gérer. Tout ça conforte la position de H2.

Le Prévôt menace alors de détruire le cargo lorsqu'il sera à portée de tir, mais encore assez loin du port spatiale. C'est une force qui a été mise en place pendant la mission de H2, il n'est pas au courant de son existence. Fin de la scène, son plan est compromis.

vendredi 18 mai 2007

Projet1, Scène 1, Seconde partie.

Il traversa la section principale sans un mouvement, passa par dessus le siège du pilote et s'y installa d'un mouvement fluide. Il décrocha le reconstituant de sa ceinture, le coinça entre les deux leviers de contrôle du ravitaillement, déploya la paille et aspira plusieurs gorgées. La fraîcheur du liquide l'aida à se détendre; Scott5 lui avait posé plus de problèmes que prévu. Il inspira à fond et boucla le harnais de sécurité de son siège. Il attrapa le casque d'intercom et le positionna sur sa tête. Une dernière respiration et il activa le canal radio du port spatial.

«Port Magellan, Port Magellan, ici le cargo Mercure370. Me recevez-vous?

—Cargo Mercure370, ici Port Magellan.» La voix du contrôleur résonna dans l'oreille de H2. «Je vous reçois fort et clair. Vous êtes en avance de trois jours sur votre plan de vol. Quelle est votre situation?

—L'équipage vient de sortir de suspension à l'instant. Pas de complications médicales à signaler.» H2 jeta un oeil sur un écran à droite. «Les moteurs de décélération ont été coupés il y a cinq heures. La trajectoire actuelle nous amènera en approche du port dans quatre jours. Les niveaux de carburant sont dans le vert, tous les systèmes sont opérationnels.

—Bien reçu Mercure. Je vous ai sur mon écran. Votre angle est correct, pas de correction nécessaire. Gardez le cap, on se recontacte dans deux jours.

—Bien reçu, Port Magellan. Pas de correction de trajectoire.» La partie facile était terminée. Les choses sérieuses allaient commencer maintenant. H2 s'éclaircit la gorge. «J'ai une requête, Port Magellan. Pouvez-vous me passer la sécurité du port?

—Ce n'est pas la procédure régulière, Mercure.

—Je sais, Port Magellan. Pouvez-vous faire une exception? C'est important.»

Le contrôleur se tut pendant de longues secondes. H2 passait en revue les autres moyens d'entrer en contact avec la sécurité du port, mais les communications depuis un cargo étaient limitées. Mieux valait convaincre le contrôleur. Alors qu'il échafaudait tout un argumentaire, le contrôleur l'interrompit.

«D'accord, Mercure. Le trafic est léger, je vais faire une exception. Restez à l'écoute.»

Le souffle de la radio remplaça la voix du contrôleur. H2 expira et reprit une respiration qu'il ne se souvenait pas avoir interrompue. De nouveau seul, sans rien d'autre à faire qu'attendre, le doute s'insinua. Alors que l'idée avait germé dans la ceinture de Kuiper, il avait redouté ce genre de situation. Il n'avait pris sa décision finale qu'au moment du retour, pour être occupé et ne pas penser aux conséquences de son plan. H2 ne voulait pas donner la moindre opportunité au doute de s'installer. Il attrapa la paille de son reconstituant et avala une longue gorgée. Il ferma les yeux et essaya de faire le vide en lui. Ses efforts ne furent pas un complet succès, mais le répit était bienvenu.

Une voix se fit entendre à la radio. «Ici la sécurité de Port Magellan, c'est quoi le problème?»

H2 sourit. Son interlocuteur était manifestement désarçonné par l'incongruité de sa requête. Il l'imagina bourru, rougeaud, engoncé dans son uniforme et mal à l'aise face au micro. H2 répondit: «Ici le cargo Mercure370. Etes-vous le chef de la sécurité du port?

—Je suis le représentant du Prévôt dans ce district. Qui êtes-vous et quelle est l'urgence? Parce qu'il s'agit bien d'une urgence n'est-ce pas?» La menace dans la voix du chef était claire.

«Je suis le clone H2, pilote du cargo. Mon responsable d'exploitation minière est le clone Scott5. En ce moment, il est ligoté et attaché dans son compartiment de couchage.

—Qu'est-ce que...

—Laissez-moi finir. Nous sommes partis il y a neuf ans en mission de collecte minière dans la ceinture de Kuiper pour le compte de Horatio, mon original. Nous venons juste d'émerger de suspension en approche finale de la Terre. Dans quatre jours, nous devrions nous arrimer à Magellan.

—D'accord, d'accord, mais pourquoi votre coéquipier est attaché?»

H2 détacha chacun de ses mots. «Je vous ai dit de me laisser finir.» Il écouta mais le chef ne dit rien. «Je vous raconte tout ça pour que vous compreniez l'existence que nous menons, nous les clones. Vous devez savoir que c'est la seule existence qui nous est permise à cause des restrictions de clonage. Je veux vous faire sentir que passer huit années en suspension et une année à collecter de la glace et de la poussière n'a rien d'enviable. Quand vous aurez compris tout ça, vous comprendrez mes revendications.»

Le chef de la sécurité ne répondit pas tout de suite. H2 l'imagina en train d'évaluer la situation le plus vite possible. Au moins, H2 avait réussi à attirer son attention. Le chef finit par parler: «Revendications? Quelles revendications?

—Je vous conseille de transmettre tout ce qui va suivre au Prévôt le plus vite possible. Je veux obtenir les mêmes droits que n'importe quel être humain. Le fait que je soit un clone n'enlève rien à ma qualité d'humain. Il n'est pas normal que les clones soient considérés comme des hommes de seconde classe dont le seul but est d'accomplir des tâches ingrates pour le bénéfice d'un original. Les clones sont les esclaves modernes, je veux nous libérer.» Tout en parlant H2 se pencha sur la console et actionna un contact puis vérifia un écran.

La voix du chef de la sécurité bourdonna dans l'écouteur. «Je ne comprends pas. Le clonage n'a été approuvé que dans le cas des voyages interplanétaires.

—Précisément. Aucun original n'accepterait de passer dix années dans l'espace, même en suspension. Il est impossible de maintenir une famille dans ces conditions. Nous les clones n'avons pas le choix et ce n'est pas normal. Je veux les mêmes droits qu'un être humain pour tous les clones.

—Le Conseil Terrestre n'acceptera jamais d'honorer une telle revendication.» Le chef laissa échapper un petit ricanement. «Je ne suis même pas certain qu'il en ait le pouvoir.»

Dans la section principale, Scott5 se mit à crier et à frapper les cloisons avec les parties libres de son corps. «Ne le laissez pas faire! Il est dingue! Venez me tirer de là!» Il avait dû entendre ce que H2 venait de dire à la radio.

H2 jeta un oeil vers la section principale mais ne put voir son coéquipier. Il déboucla son harnais, dit au chef de la sécurité qu'il allait devoir s'absenter quelques secondes et qu'il s'attendait à le retrouver à son retour, déposa son casque d'intercom et se rendit dans la section principal en vérifiant que la seringue était toujours dans sa poche.

Scott5 était ruisselant de sueur, le recyclage d'air ne parvenait pas à éliminer l'odeur de fauve de la pièce. Son visage était rouge et ses liens mordaient profondément son torse. «Qu'est-ce que tu fiches? Ça va pas? Un clone peut pas être comme un original! C'est la loi.

—Du calme, une loi ça s'adapte. Tu pourrais aussi en profiter.

—Je m'en fiche. On va finir par avoir de gros ennuis si tu continues. On pourrait être interdit de vol!

—Ça suffit! Tu te tiens tranquille, ou je t'endors.» H2 sortit la seringue de sa poche et décapuchonna l'aiguille.

«Tu peux pas faire ça! Je ne veux pas couler avec toi.» Scott5 s'agita de nouveau. «Je vais t'en empêcher.

—Alors tu ne me laisses pas le choix.» H2 attrapa le bras de son coéquipier. Il n'eut aucune peine à trouver une veine tant elles étaient saillantes. Il enfonça l'aiguille et injecta l'anesthésique. En quelques secondes, Scott5 perdit connaissance. H2 vérifia son pouls (fort et régulier) avant de repartir vers le poste de pilotage.

Il s'installa de nouveau dans le siège et replaça l'intercom sur sa tête. «Toujours là?

—Je suis là.» La voix du responsable était plus ferme. Les quelques instants d'interruption avaient dû lui permettre de faire le point. «Vos revendications n'ont aucune chance d'aboutir.

—Elles ne peuvent aboutir parce que je ne suis qu'un clone et c'est exactement pour ça que je veux faire changer les choses.» H2 s'affaira sur une autre partie de la console de pilotage.

Dans son oreille, le responsable répondit: «Non, c'est un problème politique. Le Prévôt n'a aucun pouvoir dans ce domaine. Il vous faut plutôt aller convaincre des élus et essayer de faire changer les statuts par un vote démocratique.

—J'ai un autre moyen plus rapide. Si vous consultez la télémétrie du Mercure, vous verrez que le pilote automatique n'est plus engagé. Je l'ai désactivé pour éliminer les sécurités automatiques.» H2 bascula un contrôle devant lui. «Et si vous examinez la trajectoire que je viens de programmer, vous verrez qu'elle est plus directe qu'une approche d'accostage: j'ai placé le cargo en collision avec le port spatial, l'ascenseur orbital et la planète. Si mes revendications ne sont pas prises en compte, il va y avoir beaucoup de morts. Vous avez quatre jours. Prévenez le Prévôt.»

H2 retira son casque, le jeta sur la console et se prit la tête dans les mains. Il n'était plus question de revenir en arrière maintenant.

jeudi 10 mai 2007

Projet1, Scène 1, Première Partie.

Le premier stimulus qu'il perçut fut un bourdonnement. Ensuite il devina à travers ses paupières des lumières qui dansaient devant lui. Il ouvrit les yeux. Graduellement les lumières devinrent des formes de plus en plus précises. Il ne reconnaissait pas l'endroit. Il entrouvrit la bouche et se passa la langue sur les lèvres; elles étaient sèches. Il avait l'impression d'avoir du coton dans la bouche et un goût âpre et métallique envahissait ses papilles chaque fois qu'il déglutissait une salive imaginaire. Le goût était familier mais il était incapable de le situer. Et puis il y parvint: c'était le goût induit par les drogues de suspension. Tout le reste lui revint après cela: le cargo, la ceinture de Kuiper, la Terre et surtout son plan. Il inspira profondément, expira. Si tout allait bien, il n'aurait ni à mourir, ni à tuer.

Malgré la température agréable il frissonna sur sa couchette. Il supposa que son corps lui signalait que les drogues qui avaient ralenti son métabolisme cessaient d'agir. Il retira les perfusions de ses bras et laissa flotter la tubulure au dessus de lui. Il appuya sur un contrôle et les tuyaux disparurent dans le compartiment où ils seraient stérilisés et préparés pour la prochaine suspension. Il déboucla la sangle qui maintenait son torse sur la couchette, puis enleva celle au niveau de son bassin. Aussitôt il s'éloigna doucement de la couchette mais ne fit aucun mouvement pour contrôler sa dérive. A la place il s'étira et fit quelques mouvements très lents. Il reprenait rapidement possession de son corps malgré les années passées en suspension. Lorsqu'il atteignit la paroi de la chambre de suspension, il saisit la main-courante la plus proche et se stabilisa d'un bras.

Il se trouvait au dessus de la couchette de suspension de Scott5, son unique coéquipier. Il émergerait de suspension un peu plus tard car le protocole voulait que le pilote fut réanimé le premier, le responsable minier ensuite. Scott5 donnait l'impression de dormir paisiblement. Mais son sommeil était beaucoup plus profond: ses fonctions vitales étaient tellement ralenties qu'il aurait pu passer pour mort. C'était grâce à cela que les humains pouvaient supporter les distances énormes des voyages interplanétaires. Le pilote contempla son coéquipier. Un doute commença à l'envahir, il le chassa immédiatement. La console annonçait le réveil de Scott5 dans cinq minutes; il devait se dépêcher de faire le point du cargo avant de revenir neutraliser son coéquipier.

La partie habitable du cargo avait la forme d'un cylindre divisé en trois sections. Le pilote traversa le seul sas de la section de suspension et déboucha dans la zone de vie principale. Tout le mobilier et les équipements étaient répartis sur la surface intérieure du cylindre, laissant l'axe longitudinal complètement libre. Il dériva sur toute sa longueur jusqu'au sas menant au poste de pilotage. Il le traversa et agrippa le siège du pilote face aux instruments et aux écrans de contrôle. Il attrapa la main-courante au dessus de lui et examina les cadrans.

Le vaisseau se trouvait à quatre jours de la Terre, au sortir de la phase de ralentissement, quatre ans après son départ de la ceinture de Kuiper. Le pilote consulta l'écran où était résumé le statut général du cargo. Le contrôle d'environnement était optimum et les paramètres atmosphériques acceptables. La cargaison de glace et de minerais rares avait bien supporté la descelleration et les quatre moteurs à fusion fonctionnaient au ralenti, prêts pour les dernières manoeuvres. Enfin, les niveaux de carburant étaient largement au dessus des seuils critiques. Tout allait bien, il allait pouvoir s'occuper de Scott5 avant de lancer l'exécution de son plan.

Il pivota, positionna ses pieds sur le dossier du fauteuil et donna une impulsion en direction de la section de vie commune. Il franchit le sas et flotta vers la main-courante au dessus de lui. D'un coup de poignet il changea de direction vers la réserve de nourriture. Il y prit une brique de reconstituant liquide qu'il accrocha à sa ceinture. Il flotta ensuite vers l'armoire à pharmacie sur sa gauche. Il agrippa les poignées de part et d'autre de l'armoire et plaça un pied dans un étrier au sol. Une fois stabilisé il ouvrit la pharmacie et attrapa une fiole d'anesthésique et une seringue hypodermique. Il prépara la dose pour endormir un adulte du poids de Scott5 pour une heure ou deux. Il replaça la fiole sur son étagère, recapuchonna l'aiguille, rangea la seringue dans une poche et s'orienta vers la zone de suspension. Une impulsion des deux jambes le propulsa à travers le sas. En deux changements de directions il arriva à côté de la couchette de Scott5. Il consulta l'écran de contrôle qui lui confirma que l'émergence de Scott5 était prévue dans les minutes à venir.

Il déplia la paille télescopique de son reconstituant et avala une gorgée en regardant le corps encore inerte de Scott5. Quelque part il s'en voulait de traiter son coéquipier comme il allait le faire, mais il n'avait plus le choix. Il s'apprêtait à risquer leur vie à tous les deux et à en menacer des milliers d'autres, mais il ne pouvait plus rester inactif, il devait agir. Scott5 ne pouvait pas comprendre les motivations du pilote, il était trop bien conditionné dans son rôle. Il comprendrait peut-être un jour que ce qui allait se passer était également dans son intérêt. Un signal sonore tira le pilote de ses réflexions. L'émergence de Scott5 était confirmée, il était encore inconscient mais ne tarderait pas à refaire surface. Il était temps d'agir.

Le pilote laissa échapper la paille qui se rétracta dans la brique. Il déboucla la sangle encerclant le large torse de Scott5 et la retira des passants de la couchette. Avec il encercla le torse et les bras de Scott5 au niveau des biceps et serra. Il récupéra ensuite la sangle maintenant le bassin de son coéquipier et lui attacha les mains. Enfin il mit la main sur une sangle de sa propre couchette et entrava les pieds de Scott5 au moment où il reprenait conscience.

Scott5 ouvrit les yeux et regarda autour de lui. Il vit le pilote, lui sourit et referma les yeux. Le pilote en profita pour enlever toutes les perfusions de Scott5 et s'éloigna. Scott5 ouvrit les yeux de nouveau. Il esquissa un geste du bras mais se rendit compte qu'il était attaché et qu'il flottait au dessus de sa couchette. Il regarda de nouveau le pilote, les yeux grands ouverts, complètement réveillé cette fois.

«H2, qu'est-ce que tu fous? T'es dingue? Arrête de déconner et détache-moi.

—Je ne peux pas, Scott5. J'ai quelque chose à faire et je ne veux pas que tu me gênes. Je vais t'emmener dans ton compartiment de couchage et tu vas y rester sans faire de bruit, d'accord?

—De quoi tu parles? Détache moi, j'ai pas envie de jouer.»

Scott5 s'agitait de plus en plus sous l'effet de la colère. Son visage devint tout rouge. De grosses gouttes de sueur perlaient sur son front et furent propulsées dans toutes les directions lorsqu'il secoua la tête en se débattant. Il poussa un cri de rage et de frustration et tira de toutes ses forces sur les liens qui le retenaient. La sangle sur sa poitrine mordait profondément dans les muscles de ses bras. Il arqua son corps d'avant en arrière pour faire bouger ses entraves sans succès. Sa masse et la suspension eurent bientôt raison de lui, il s'épuisait rapidement.

H2 en profita pour attraper Scott5 par sa tunique et se laissa dériver avec lui. Leur visage n'étaient séparés que de quelques centimètres, H2 sentait la respiration de Scott5 sur ses joues. Le gabarit impressionnant de Scott5 n'était guère un avantage en apesanteur. H2 brandit la seringue devant Scott5.

«Ecoute moi bien. Si tu ne te calmes pas, je te fais une injection qui va t'endormir pour quelques heures. Pour moi c'est la même chose. Tu te calmes et tu reste conscient, où alors tu retournes dans les bras de Morphée. Tu choisis quoi?»

Scott5 observa H2 pendant quelques secondes en évaluant la proposition. Son visage finit pas se décontracter.

«Je viens de passer les quatre dernières années à dormir, je veux rester éveillé. C'est bon, je reste calme.

—Bien.» H2 agrippa Scott5 par une sangle et l'emmena dans la section principale. Il plaça son partenaire dans son compartiment et l'y arrima. Scott5 ne quitta pas des yeux H2 pendant toute l'opération, comme s'il cherchait des réponses sur son visage.

«Qu'est-ce tu fous, H2?

—Tu verras bien.» Le pilote se retourna et fusa vers le poste de pilotage en une impulsion.